Les grosses installations ont sécurisé l’activité des forestiers, en leur apportant des débouchés durables dans le temps
Frédéric Cruchon, Directeur de Biomasse et Développement
La filière bois-énergie a marqué un virage sans précédent, au tournant des années 2010, avec l’apparition de grosses centrales biomasse impulsées sous l’effet des appels d’offres CRE, successivement lancés depuis 2003. A leur mise en service, ces premiers projets d’ampleur – dont certains consomment près de 100 000 t/an – posaient la question de l’approvisionnement, dans des proportions jamais atteintes jusqu’alors.
« Depuis 4 ans, le marché connaît une montée en puissance très nette et cela a été un challenge d’apporter une réponse à la fois quantitative et qualitative face à la demande, observe Frédéric Cruchon, chargé de l’approvisionnement en bois des chaufferies Dalkia dans 35 départements du Grand Ouest (soit 650 000 t/an). Ce démarrage s’est fait en douceur, notamment grâce aux installations de tailles modestes préexistantes, ayant permis de structurer la filière. Ainsi, il n’y a pas eu de souci en termes de ressources et il n’y en a toujours pas, même en Bretagne qui n’est pas une région fortement boisée. A ce sujet, rappelons qu’en parallèle aux plaquettes forestières, les centrales biomasse consomment également des déchets verts. En termes de retour d’expérience, il s’avère que les grosses installations ont surtout eu pour effet de sécuriser l’activité des forestiers, en leur apportant des débouchés durables dans le temps. Mais ce constat positif ne doit pas signifier que la filière – qui est encore jeune – ne doit pas continuer à se structurer. »
Alors, quelles sont les pistes à explorer ? « On se retrouve avec un secteur d’activité fortement morcelé en amont, où près de trois quarts des 16 millions d’hectares de forêts françaises sont privées, avec des parcelles de l’ordre de 2 à 5 hectares, souligne Frédéric Cruchon. En aval, il y a aussi de nombreux acteurs concernés par la transformation du bois. Il s’agit donc de toujours mieux organiser tout cela. Ensuite, en parallèle aux outils existants, comme le fonds chaleur ou la TVA réduite pour les centrales « énergies renouvelables », il pourrait y avoir des assouplissements réglementaires ouvrant l’accès aux bois de récupération, de palettes ou issus de déconstruction, ceux-ci étant encore considérés comme des déchets. D’ailleurs, concernant la diversité des ressources mobilisées, nous continuons à réfléchir sur la définition d’un mélange-type de biomasse qui permette d’assurer une courbe homogène, afin d’obtenir un fonctionnement optimal et fluide des centrales. Comme pour le reste, tout cela se met progressivement en place. »